Voyager : Queer et racisé

J’aime les voyages et prendre l’avion est un kif. En tant que personne queer racisée, je sais que les voyages ne sont pas de tout repos. Déjà que je n’ai pas le bon passeport, malheureusement, les passeports haïtiens, africains et caribéens ont la réputation de prendre racine là où ils vont.

Ma petite heure d’attente s’est vite transformée en douze heure de layover, la faute à ce fameux bug informatique qui m’a permis de visiter l’aéroport et ses nombreux magasins si j’ai retenu une chose des voyages c’est que la plupart des aéroports facilitent la vie aux voyageurs contrairement à la rigueur en cours dans les aéroports américains.

Je ne suis pas non plus épargné du profilage racial. Je faisais mon exercice préféré dans les aéroports, lorsque j’ai remarqué que “l’homme blanc”, représentant de vente,me suivait un peu partout, comme s’il s’attendait que je prenne la fuite parfum à la main.

J’ai voulu en rire et je me suis rappelé qu’à Londres j’étais un inconnu et qu’en tant que personne racisée j’étais dans sa tête d’homme blanc « un des leurs ». Heureusement que, contrairement à l’agneau de la fable, je ne me suis pas perdu en explications.

Je suis retourné au même magasin et je me suis fait servir par quelqu’un d’autre. J’y ai dépensé une belle somme, par amour des parfums mais aussi par ego pour bien lui montrer que je pouvais certainement m’offrir ce qui me faisait plaisir.

Voyager, c’est aussi accepter de vivre ces moments où on est retenu plus longtemps pour que vos documents soient scannés une seconde fois, c’est rire dans son cœur quand un officier noir vous dit je ne connais pas Haïti.

Voyager c’est aussi se faire jauger et se sentir dépaysé de voir autant de personnes blanches pleines d’elles-mêmes. Se faire piétiner et bousculer et dire tout haut le fameux ZKKLGMMW.

Lorsque j’ai commencé à écrire ce texte je vivais mon périple à fond et je pensais être au bout de mes peines c’était sans compter mon arrivée tardive à Munich et mes bagages qui n’étaient pas au rendez-vous.

Je m’inquiète un peu il est minuit passée et la facture de taxi salée va vite me ramener à mon projet le plus important, une bonne nuit de sommeil pour me reposer de ce long périple

Voyager, c’est aussi vivre ces moments où l’on se sent observé, jugé, voire même accusé sans raison. C’est un défi de chaque instant, un exercice de patience et de résilience. Chaque aéroport devient une scène où se joue une pièce dont on est à la fois l’acteur et le spectateur. Pourtant, malgré les regards lourds de suspicion, je ne renonce pas à mon plaisir de découvrir le monde.

Un des voyages les plus marquants de ma vie, a été ma visite de Johannesburg en 2023.L’officière de l’immigration avait juste regardé la première page ainsi que le visa et elle s’est contente de me sourire et de me souhaiter un bon séjour.

Je passe ma journée du samedi en toute sérénité à faire les magasins je sais que je pourrais mais je me retiens de marcher tout nu dans Munich, mon magnifique corps d’athlète attirerait trop de regards. Le dimanche matin j’ai le stress de ma vie je présente devant une salle comble, à la fin de la présentation : tonnerre d’applaudissements. Je jubile et le reste de la journée se passe comme un charme pis lundi matin comble de bonheur :mes bagages sont LÀ.

Commentaires

4 réponses à « Voyager : Queer et racisé »

  1. Avatar de Jessica FRANCK
    Jessica FRANCK

    Merci de me faire voyager à travers tes textes. Xoxo. ❤️

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  2. Avatar de Mohao Metivier
    Mohao Metivier

    c’est superbement bien ecrit ! Merci de nous faire voyager et de partager le monde avec nous!

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  3. Avatar de Shoomeatove

    J’adoré vivre ce voyage à travers ton récit: drôle, mais profond! Max de love!

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  4. Avatar de Duckenson Etienne
    Duckenson Etienne

    Jai

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